Le précieux pouvoir des pierres
30 janvier - 15 mai 2016Marina Abramović, Michel Blazy, George Brecht, James Lee Byars, Pierre Laurent Cassière, Marion Catusse, Marine Class, Hubert Duprat, Jean Dupuy, Paul Armand Gette, Isabelle Giovacchini, Guillaume Gouerou, Laurent Grasso, Alicja Kwade, Didier Mahieu, Aurélien Mauplot, Éric Michel, Damián Ortega, Ève Pietruschi, Emmanuel Régent, Evariste Richer, Jean-Philippe Roubaud, Bettina Samson, Valentin Souquet.
MAMAC
Promenade des Arts - NiceVernissage :
Vendredi 29 janvier 2016 - 18.30
En présence de Maître Gérard Baudoux, Adjoint au Maire de Nice, délégué aux musées et à l’art moderne et contemporainLes minéraux suscitent la curiosité et l’émerveillement collectifs. Qui, petit ou grand, n’est pas parti à la chasse aux cailloux, collecter les spécimens les plus curieux pour les arranger en une constellation de petits trésors ? Cet attrait oscille entre la simple curiosité d’amateur et la contemplation esthétique, entre la croyance spirituelle ou magique et l’expérimentation scientifique. Si cette fascination en art s’inscrit dans une histoire qui reste encore à écrire, aujourd’hui force est de constater l’engouement des artistes actuels pour la minéralogie et plus spécifiquement pour le précieux pouvoir des pierres. Certains artistes les utilisent brutes tels des ready-mades re-sensibilisés, les collectent, les mettent en scène ou les représentent, quand d’autres les soumettent à des expérimentations, les transforment et produisent des simulacres.
Légende et crédit photo :
Alicja Kwade (1979, Katowice)
Lucy, 2004-2006
Charbon noir pressé et agent adhésif
14 x 14 x 18 cm
Courtesy KÖNIG GALERIE, Berlin
© Alicja Kwade - Photo : Matthias Kolb
Conçue comme une véritable immersion, l’exposition « Le précieux pouvoir des pierres » imbrique plusieurs temps restituant les différentes résonances et vibrations singulières que les artistes confèrent aux minéraux. Une première traversée invite à un voyage spirituel dans la relativité spatio-temporelle ouvrant sur l’imaginaire et la symbolique engendrés par les phénomènes occultes et les grands mystères de la nature. Puis, vient le temps de la collecte et de la représentation dans lequel le visiteur est transporté dans une sorte de cabinet minéralogique parsemé de simulacres et de vanités. L’exposition a été réalisée avec le concours du Muséum d’histoire naturelle de Nice. |
Evariste Richer (Montpellier, 1969) « Les Micachromes » (détail), 2012 Série de 11 cibachromes, 172 x 123 cm (chaque, encadré) Courtesy de l’artiste et d’UntilThen, Paris © Evariste Richer |
Un voyage spirituel dans la relativité spatio-temporelle |
Les pierres constituent de précieuses archives de la terre. Elles induisent une dilatation du temps. À leur contact et lecture, l’homme pénètre dans des temps immémoriaux, ouvrant sur un voyage spatiotemporel dans la concrétion du monde et de l’univers. Car si les pierres semblent figer dans temps, leurs strates sont le signe de l’évolution perpétuelle, constituant ainsi une sorte de mémoire vive de la planète. Shoes for Departure [1991] de Marina ABRAMOVIĆ présente deux monolithes d’améthyste taillés en sabots invitant le visiteur à un voyage immobile au coeur du pouvoir des pierres. La sculpture élégante et minimale de marbre blanc Thin disk with hole [1994] de James Lee BYARS se dresse face au spectateur et soulève des questions ontologiques. De l’autre côté du miroir, tel un passage, l’installation fluorescente d’Éric MICHEL, Fluorescences [2015], met en interaction monochromes et fluorites révélant, sous les effets de la lumière noire, un environnement où tout semble connecté sans passer par le filtre du langage. La pierre, lorsqu’elle agit comme un grain de sable, révèle également l’ambigüité du réel et du monde. L’installation vidéo Psychokinesis [2008] et les tableaux à l’esthétique faussement médiévale ou renaissante de la série « Studies into the Past » de Laurent GRASSO attestent du phénomène de la lévitation de la pierre par la pensée dans une temporalité en suspens. Nous sommes ainsi plongés dans un univers paradoxal, à la lisière entre réalité et fiction, croyance et science, visible et non visible, passé, présent et futur. Les expérimentations scientifiques et photographiques du XIXe siècle nourrissent les oeuvres de Bettina SAMSON et d’Isabelle GIOVACCHINI basées sur la représentation des phénomènes occultes, entre apparition et disparition. |
Marine Class (1983) Pierres de rêve, 2013 Bois peint, céramique émaillée, papier marbré, cuir, cailloux, crayon de couleur sur papier, laiton, 40 x 34 x 35 cm Dessin, 24 x 30 cm Courtesy de l’artiste © Marine Class |
L’imaginaire et la symbolique engendrés par les phénomènes occultes et les grands mystères de la nature |
Le pouvoir supposé des pierres est parfois détourné par les artistes. Ainsi, se dessinent d’étranges phénomènes mêlant tour à tour réalité et fiction, croyance et mythe. Dans un jeu de métaphores et de mythologies totalement démystifiées, Paul Armand GETTE associe des représentations de nus et sexes féminins à des roches volcaniques et phalliques en des sortes d’autels mystérieux intensifiant la charge érotique de ces installations qui semblent hors du temps. Masque à faire tomber la neige [2010] d’Evariste RICHER rapproche un morceau de calcite naturel à la fonction rituelle du masque. La pierre blanche dont la matière grumeleuse et parsemée d’impuretés évoquant la neige et percée de deux petits trous, est présentée sous vitrine tel un objet ethnographique. Le masque anthropomorphe devient ainsi un objet sacré relatant le désir proprement humain de comprendre et de maîtriser les phénomènes naturels. Cinco anillos [2011] de Damián ORTEGA assemble des fragments de verre coloré, d’alliage (zamac), de câble métallique, de papier de verre et de tezontle, roche volcanique rouge utilisée dans le domaine de la construction au Mexique, en une sphère cosmique en fonctionnant comme un piège optique renvoyant à la magnétosphère et plus précisément aux anneaux d’Uranus. Dans cette évocation du micro et du macrocosme, l’oeuvre Sol [2015] constitue une version recentrée à partir d’une simple boule de carton-pâte. |
La réserve lapidaire, simulacres et vanités |
Les cabinets de curiosités constituent des théâtres de la mémoire de l’homme sur le monde mis à l’épreuve par la création artistique. Certains artistes jouent sur le leurre et le simulacre. Michel BLAZY crée ses propres agates et septarias à partir d’un simple rouleau de papier peint, gorgé d’eau et de colorant alimentaire. Ces « Pierres qui sèchent » [2015] évoluent ainsi au fil du temps, rejouant ainsi les effets de la cristallisation et rappelant que les pierres en apparence inertes demeurent en perpétuelle mutation et enregistrent, tel un sismographe, les pulsations de la planète. Lucy [2004-2006] d’Alicja KWADE représente un diamant noir à partir de charbon compressé et d’agent adhésif. Disposé sous cloche, la sculpture n’a rien à envier aux diamants les plus précieux. À l’instar du fossile nommé Lucy1 qui a révolutionné notre conception de l’origine de l’humanité, ce cristal noir fonctionne comme un leurre. D’autres artistes organisent en curieuses collections ce qu’ils considèrent comme des pierres de rêve. Marine CLASS transforme une boîte à outils en une collection miniature et mobile de petits cailloux évoquant les pierres des lettrés chinois. Hubert DUPRAT assemble en un tas disposé au sol, plusieurs tonnes de magnétites, telle une sculpture minimaliste et conceptuelle. Ces pierres naturellement aimantées et taillées en cabochon dessinent un amas étrange oscillant entre l’amoncellement de bijoux scintillants et une concentration de diptères nécrophages, cette sculpture susurre à l’oreille du spectateur le précieux avertissement « Souviens-toi que tu vas mourir ». |
Toute pierre est montagne en puissance |
Les pierres, par leur beauté spontanée, semblent à la fois contenir le passé originel et le devenir, le |
Paul Armand GETTE Dans le cadre du vernissage de l’exposition, le vendredi 29 janvier, Paul Armand GETTE procédera à une célébration à Aphrodite, L’Apothéose des fraises ou Les Menstrues de la déesse, assisté de trois jeunes étudiantes de l’école municipale d’arts plastiques de la Villa Thiole, Anna Balkin, Morgane Lepechoux et Elisabeth Verrat. |