Galerie Daniel Templon
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JULIAO SARMENTO ET LA RECENSIONS DU SECRET L’ŒUVRE AU NOIRJuliao Sarmento, « Quelques jeux interdits », 7 janvier-12 février 2012, Galerie Daniel Templon Paris.
Dans l’œuvre de Juliao Sarmento il n'existe pas de ciel. A peine des « fonds ». L’essentiel demeure dans l’inconnu. Ne restent souvent que des femmes, mèches noires d'alacrité sur un fond clair mais opaque qui permet de révéler l'obscur noyau d'un secret dont on ne saura rien sinon quelques indices souvent sans visage. Les corps ne font plus corps mais n'échappent pas à leur charge et ne se contentent plus du voile.
De telles silhouettes sont pour une part (importante) des projections de corps fantasmés mais surtout des traces de présence saisie au sein d’une absence. Le support lui-même garde non seulement des « grains » de peau ou de surface mais des tâches, des salissures comme s’il s’agissait autant d’études préparatoires que de peintures. |
Plus ou moins sexuelles les scènes suggestives de diverses formes de désir déréalisent les corps. Comme les déréalise le noir qui caviarde tout effet d’indentification et de jouissance au sein même des sérialités de l’artiste. L’anonymat y demeure essentiel. Les femmes sont représentées le plus souvent sans visage. Jouant sur la présence tout autant que de l’absence, les images ouvrent à une forme de pornographie donnée pour ce qu’elle est : une émotion physique surgie d'un fantasme incarné dans l'absence. Le noir n’est jamais innocent dans ces « jeux ». Il est le négatif d’une autre présence : celle de l’âme peut-être ou celle – plus simplement – d’une autre présence qui ne serait plus fantasmée mais réelle. Tout se charpente sur divers types d’équilibres et de déséquilibre au sein d’apparitions diffractées. L’espace entre les divers éléments de chaque pièce est capital. Il isole, sépare divers éléments (corps, paysages, phrases). L’œuvre est donc construite sous divers processus de montages. Une phrase par exemple peut autant illustrer l’image que renforcer son mystère. Une image vient se coller à une peinture. Dans « A Ghost Story » (2009) au corps esquissé d’une femme (dont le bras gauche semble retenu par un élastique tiré du hors-champ) viennent s’adjoindre selon un autre angle de visions deux photos concomitantes. Proche en ce sens d’un certain Pop art – mis le plus sobre qui soit – Juliao Sarmento offre une réflexion sur le sens des images érotiques ou pornographiques et la chosification de l’espace de désir et du corps qu’elles induisent. Le monochrome lui-même joue un rôle important afin d’instruire une distance avec ces femmes à peine esquissées mais dont parfois sont soulignés les appâts les plus « confondants ». Dans la série « Domestic Isolation » l’artiste fait même pénétrer dans les espaces circonscrits, à savoir les maisons et les pièces de vie de ces silhouettes noires. Le corps y est souvent présenté sur le même plan que l'objet: corps objet, il est un bien de consommation comme un autre. Une telle œuvre est proche d’une vision cinématographique et plus particulièrement du plan séquence que l’artiste a développé dans certaines de ses vidéos. De plus une peinture telle que «Some Rethorical Structures To Be Identified In This Image » où une femme avance son bras vers le ventre de l’autre le titre lui-même est significatif. Les termes « structures rhétoriques » précisent l’intention de l’artiste de même que l’interprétation qu’il faut donner à l’image. Il s’agit celui d’une « Visitation ». Elle rappelle explicitement le célèbre tableau de Pontormo (« Visitation de Carmignano ». Sarmento n’est d’ailleurs pas le seul artiste de la postmodernité à s’intéresser à cette œuvre. Le maître de la vidéo Bill Viola dans « The Greeting » reprit les interrogations que pose cet archétype de l’histoire autant de la peinture que du religieux. On retrouve d’ailleurs dans les vidéos de Sarmento la même dimension picturale que chez Viola. Le film le plus célèbre du premier (« Shadows ») met en scène de manière très baroque le corps des femmes. Le film débute sur un plan fixe sur un écran blanc. S’y projettent les grains de la bande annonçant le grain de peau du cou d'un modèle. Le cou ne se distingue pas immédiatement passant de l'ombre à la lumière. Ensuite deux femmes apparaissent. Elles sont couchées sur le côté. La blonde aux lèvres rouges regarde fixement la caméra, le visage de la brune est déjà presque hors champ. Les deux vont disparaître puis réapparaître dans un jeu d'ombre et de lumière, dans un effet de clair-obscur. La succession de plans fixes les met à distance. Mais là encore rien ne peut trahir leur personnalité et faire lever « du » fantasme. La peinture par le monochrome, les vidéos par les mouvements et les axes décentrent donc toujours l’image potentiellement érotique ou pornographique. L’oeuvre la remet en cause. Dans de telles oeuvre pourtant demeure la chair mais dans l’immense peau blanche d’un décor qui n’est plus et qui déréalise le corps lui-même. Le secret demeure donc exhibé mais caché. Non que l’artiste le voile mais parce qu'il ne peut et veut rien dire de plus. Dévoiler le secret ne revient jamais à montrer mais en exhiber les stigmates, les énigmes. C'est là où la peinture de Sarmento « fait signe » dans ses points de fuite. Il faut donc se laisser prendre par sa langue plastique qui se joue toujours à l'extrémité d'une représentation. Le peintre - lui-même arrosé par le mystère féminin - prive le voyeur de ses habituels repères. Reste la pâleur des fonds - nécessaire pâleur de neige -, reste le noir qui boit le blanc et fait vibrer les masses, les épures, les dépôts. Demeure enfin et surtout l’incertitude de ce qui est vu au sein d’un processus de répétition. Il travaille le cœur de cette peinture où rien n’est définitif. Jean-Paul Gavard-Perret |
Biographie Julião Sarmento |
Né à Lisbonne en 1948. Vit et travaille à Estoril, au Portugal. |
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