Joe Downing est un peintre franco-américain né le 15 novembre 1925 à Tompkinsville dans le Kentucky (USA), il est décédé le 29 décembre 2007 à Ménerbes dans le Vaucluse.
Il participe à la Seconde Guerre mondiale en Europe. Il fait des études à l'Art Institute de Chicago. Il s'installe en France en 1950. Il vit et travaille à Ménerbes jusqu'à son décès.
Joe Downing fut l’un des artistes défendus par la galerie Arnaud à Paris. Dans l'ambiance de Saint-Germain-des-Prés, peintres, galeristes, collectionneurs, critiques forment « un village » affirme Joe Downing qui, au fil des années, met en place, sur ses toiles, un incroyable puzzle dans lequel le plaisir du coloriste s’exprime sans retenue. Attiré par les supports inaccoutumés, il peint sur des vieilles portes, des fenêtres, puis des cuirs.
Joe Downing est l’un des plus authentiques représentants de l’abstraction « libre » d’après-guerre. A travers un fourmillement de formes, devenues de plus en plus lumineuses avec le temps, il développe une poétique très personnelle de l’espace, du rythme et de la couleur. L’artiste nous communique son « émerveillement » par des toiles, des agrafages, mais aussi des peintures sur cuir clouté, sur châssis de fenêtres récupérés ou sur de vieilles portes de grange. A croire qu’il n’y aurait pas chez lui de frontières bien marquées entre le quotidien le plus banal et l’imaginaire pictural. En fait pour Joe Downing, seul le regard peut se désenchanter, le monde, lui, continue à vibrer : ailes de papillons, feuilles de platanes, lézardes de murs, tout vibre, tout vit. Il faut réapprendre à voir et à écouter. Textes pour l'hommage rendu à Joe Downing - Ménerbes 2008 |
A Ménerbes, le fond de mon atelier est le rocher à nu, mon chevalet se dresse entre trois fenêtres. Je vois les tuiles d'un toit, tachetées de lichen gris et jaune, attentives au soleil comme des oeufs de dinosaure. |
Joe Downing huile sur toile 54 x 65 cm |
A l’occasion de la sotie de l’album « A Ménerbes », qui rassemble sept poèmes et huit lithographies du peintre Joe Downing, le galeriste Pascal Lainé présente quelques-unes des dernières œuvres de l’artiste américain. On le sait, Joe Downing a élu domicile en Provence, à Ménerbes, à la fin des années 60. Au creux d’une ruine, il s’est crée une maison qui a tout de la caverne d’Ali Baba, peuplée d’objets insolites et beaux, glanés au hasard des trouvailles et des rencontres. C’est sans doute la conjonction de ce lieu très fort, qui lui est comme un repère et du paysage alentour, avec ses ombres et ses lumières, la pureté de son ciel, qui a nourri l’art de Joe Downing. Son installation dans l’éblouissement de la nature provençale a modifié sa peinture et changé son existence. Et c’est un hymne à cet évènement que le peintre a voulu chanter en associant lithographies et textes. Ce recueil a été composé à partir d’une série d’aquarelles peintes au fil des ans. L’idée d’un album de lithographies est venue au galeriste Pascal Lainé il y a plusieurs années. Il souhaitait que le travail soit réalisé par les ateliers Pons. En effet, ce graveur qui a travaillé avec Hartung, Poliakoff, Deyrolle et beaucoup d’autres grands noms de l’école de Paris, est un des derniers à utiliser la pierre de Munich dont les carrières sont aujourd’hui épuisées. Cette méthode traditionnelle exige entre sept et neuf passages d’encres différentes pour chaque lithographie et confère aux œuvres une qualité exceptionnelle. Mais c’est surtout la connaissance du métier et une « Sensualité de l’image immense » comme le dit Joe Downing, qui font de ce graveur un maître. « Il en est sorti quelque chose que je n’avais jamais vu sortir ni de mon travail, ni tu travail de quiconque » ajoute celui-ci. L’idée d’adjoindre des textes aux lithos est venue de l’artiste sans qu’il sache vraiment expliquer pourquoi. La langue maternelle de Joe Downing est l’américain, mais il s’exprime dans un français d’une incroyable justesse et d’un merveilleux raffinement. C’est avec un soin extrême qu’il choisit ses mots, usant avec subtilité et finesse d’expressions qu’il aime imagées, colorées et de préférence teintées d’humour. Bref, le français de Joe Downing est un pur régal et on l’écouterait parler des heures. De ses poèmes, qu’il a écrits récemment, il dit : « J’en avais deux ou trois en tête depuis longtemps. Et quand j’y ai repensé je me suis aperçu qu’ils étaient prêts à sortir, comme s’ils avaient attendu ». C’est un chant à Ménerbes et à ses habitants, un chant aux pierres et aux arbres, aux souvenirs d’instants anodins, de jours précieux et lumineux, que le peintre élève. C’est une sorte d’offrande qu’il présente, un cadeau, tout simplement. Isabelle Scheibli, L’Hebdo Vaucluse 16 décembre 2005 |
Joe Downing Collage et agrafage années 50 |
Pendant près de cinquante ans, Joe Downing a conservé un stock de papier, feuilles utilisées à l’époque aux Etats-Unis dans l’un des tout premiers systèmes de photocopie et donc imprégnées d’une solution argentique sensible à la lumière. Celle-ci, en évoluant, a fait du simple papier blanc un support bien plus précieux, tantôt saupoudré de taches blondes, tantôt transformé en feuilles d’acier bleu ou de noir opaque. En puisant à nouveau dans ce qu’il appelle ses « carrières de papier », Joe Downing a renoué avec une démarche ancienne, qui avait produit autour de 1955 toute une série de découpages et d’agrafages, dont neuf forment aujourd’hui au Musée Calvet un polyptyque aussi subtil que monumental. Les agrafes, cette fois, ont disparu. Leur éclat métallique et cuivré accompagnait la gamme chromatique chaude des fragments découpés dans les feuilles couleur d’ambre ou de tabac de façon tout à fait appropriée. En y renonçant, Joe Downing confie au papier découpé le rôle exclusif et majeur de faire chanter matière, formes, couleurs et lumière. Appartenant à la fois au champ de l’œuvre sur papier et à la trame de la tapisserie, bien de ces découpages entrelacent les bandes ciselées dans une démarche où la texture se fait textile. Mais la suprématie du trait obtenue ici au ciseau et non à la pointe du crayon ou de la plume, et la douceur du support nous maintiennent bel et bien au royaume du dessin. Un signe de plus nous en est donné lorsque, puisant dans une autre « carrière », en l’occurrence les feuilles manuscrites d’un grimoire rédigé à Mormoiron en 1640, Joe Downing mêle l’arabesque capricieuse d’un paraphe, les pleins et les déliés d’une écriture, les fragments d’un récit ancien à ses propres fictions contemporaines. Et tel trait d’encre d’autrefois, qui a viré du noir au brun sur le papier jauni, évoque irrésistiblement la matière et la fougue des dessins de Rembrandt. Au-delà des matières s’ouvre le vaste champ des sens, à moins qu’on ne préfère considérer que ces formes arbitraires voire aberrantes relèvent du nonsense anglais. Ce ne serait pas entièrement immérité s’agissant d’un artiste qui n’a rien perdu, en s’installant dans le Luberon il y a quarante ans, d’un humour tout britannique et de la plus chaleureuse excentricité. Mais ce serait passer à côté de l’artiste profond, du peintre attaché à creuser son sillon et y semer, œuvre après œuvre, les ferments d’un art de l’onirique et de l’invisible. C’est là que le processus pratiqué par Downing dans sa peinture nous apporte un précieux élément d’analyse : des toiles en grand nombre, préparées dans l’atelier en ce mois de mars 2004, attendent d’être reprises une à une par l’artiste : il y a réparti des bouffées de toutes couleurs, émergeant de fonds monochromes sombres ou clairs qui annoncent la tonalité générale du tableau. Sur ces lumières viendront se superposer d’autres éléments colorés, fragments d’un puzzle où les percées comptent autant que les parties pleines, et laissent apparaître les éclats des fonds dans un savant jeu de trames. A propos des collages et de leurs fragments découpés et plaqués sur leur support, Joe Downing dit : « Il faut laisser un trou, parce qu’ils se parlent ». Et voici d’un coup ces créatures de papier devenir les acteurs d’un théâtre, les protagonistes d’une conversation d’ordre dramatique et plastique à la fois. A vrai dire, ces éléments irraisonnés et pourtant évocateurs de formes connues du réel -flammes, ballons, larmes, os, tout ce qu’il plaira à chacun de voir– évoquent les corpuscules imaginés par les Surréalistes, sortes de galets qui, chez Tanguy notamment, prennent la force de véritables personnages. Et si ces formes devaient évoquer des sculptures, ce serait aux rondeurs monumentales d’Henry Moore que l’on penserait. Ces deux rapprochements ont surtout l’intérêt de dégager la référence constante de ces collages au minéral, combiné aux articulations du squelette, dans un équilibre où chaque élément pèse d’un poids fait à la fois de sa forme et de sa couleur. Qu’à cet univers d’os et de pierre –les sols d’Uccello et de Signorelli ne sont pas loin non plus- viennent se mêler parfois l’écriture et la peinture, citées en parcelles enchâssées, en éclatantes incrustations, n’est qu’un supplément d’humanité introduit dans ces paysages lunaires. En remarquant très justement devant les Totems peints qu’ils semblaient faits d’une collection de petits tableaux qui pourraient exister chacun pour son compte, Pascal Lainé mettait le doigt sur la confusion des échelles soigneusement entretenue par l’artiste tout au long de sa carrière : le petit et le grand associés, le détail dans le monumental mènent directement à ces collages dont la taille ne bride aucunement le sentiment qu’ils dégagent d’espaces illimités en profondeur et en étendue. En cela, ils se rapprochent de pièces pour piano, où sous les coups secs des marteaux, les cordes donnent naissance à des vibrations infinies. Mieux que le délassement d’un peintre, ces œuvres d’une modestie revendiquée installent les fruits de l’imaginaire dans le champ du réel. Pierre Provoyeur, Conservateur du Musée Calvet de 1995 à 2004 (pour l'exposition d'Avignon en 2004) |
Joe Downing Huile sur bois 46 x 35 cm de 2006 |
Depuis sa première exposition à Chicago en 1950, Joe Downing n'a jamais cessé de peindre, donnant vie aux matériaux les plus divers : toiles, papiers, cuirs, planches, fenêtres, portes, vieilles tuiles ... Jardinier de la lumière, il joue avec ses reflets, toujours émerveillé. Dans cet univers féérique, il nous invite, loin des banalités du monde. Son silence ouvre en nous un oeil d'enfant, ébloui par cette richesse qu'il nous révèle. Ce peintre-poète est aussi un prophète qui suggère et interroge "quand le jour ruine les ténèbres" ... "temps volé, temps sauvé" par une secrète présence dont les légères et subtiles particules dansent dans le coeur... Joe Downing voit des braises sous nos cendres. Christine Marandet (pour l'exposition de Gordes en 1999) |
Le tableau recueille tous les messages, ceux du soleil à travers les feuilles d'arbres ou ceux des bonshommes creusés dans le plâtre des murs. Peut-être les croyiez-vous différents ? Ils sont voisins. Ils se superposent. Quarante ans après, Downing perçoit mieux la parenté des êtres et des choses. A tous ces messages qu'il accueille, il s'en ajoute un, dont il m'a parlé, qui lui vient de sa famille. C'est celui de cette portée musicale de fils tendus qu'une certaine araignée tisse à côté de sa toile. Elle y écrit la date de la fin du monde. Le vent souffle : il déchirera les fils. La date demeurera secrète. Sans doute l'araignée et le vent sont-ils bien dans leur rôle de révéler et d'effacer, alternativement. La peinture de Downing fonctionne à ce niveau, entre la présence et l'oubli, entre la pensée et sa disparition. Dans ses tableaux émergent, comme dans la mémoire, des systèmes très anciens ou tout nouveaux. Les voici un peu brouillés, un peu usés, un peu cassés. Ils ont perdu leur sens précis, mais la peinture leur en donne un autre. Ils n'appartiennent plus à la connaissance archéologique. Ils sont tantôt chauds, tantôt frais, comme un corps dont le coeur bat. La peinture les fait redevenir vivants. La peinture de Joe Downing a une telle confiance dans la vie, elle condense des durées si longues que, désormais mieux ouverte sur l'existence, mieux intégrée dans la durée, sous l'apparence innocente de jardins, elle offre des raisons d'être. Je trouve qu'elle a quelque chose de l'araignée : elle écrit sereinement la fin du monde. Elle l'écrit éternellement. Et c'est ainsi qu'il est parvenu à concilier le beau et le bon. Pierre Descargues (Extrait de " Joe Downing, une vie de peinture " Editions PACA pour l'exposition de Gordes en 1997) |
« Joe, je suis complètement enthousiasmée par tes tableaux, ils me donnent envie de les nommer, de les appeler. Ils sont la joie de la liberté, sa fraîcheur, et en même temps ils sont la violence incommensurable, océanique, de cette liberté. Derrière l'explosion de la couleur, je vois la forêt immobile, les arbres nus et lisses et chantants. Il y a aussi le vent qui passe, qui envahit la terre et qui repart, qui tourne autour des arbres et les laisse recouverts des embruns de la mer. Ils brillent, les arbres, noyés de larmes et de joie... ». Marguerite Duras (pour l'exposition de Gordes en 1993) |
« Je peins comme un Kentuckian de village, lâché enfant dans les grottes et les collines, né une deuxième fois devant les collections éblouissantes de l’Art Institute de Chicago, et trempé toutes ces années d’adulte dans la lumière de Paris et dans celle de l’architecture et des tableaux de Florence, Venise et d’autres villes italiennes (...). Joe Downing (extrait d’une lettre à l’Herald Tribune - 1983) |
Joe Downing huile sur toile 130 x 162 cm de 2006 |
Collections publiques : |
FRANCE Paris - Musée National d'Art Moderne Paris - Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris Avignon - Musée Calvet http://www.musee-calvet.org/ Brest - Musée des Beaux Arts Beauvais - Musée Départemental de l'Oise Metz - Musée d'Art et d'Histoire Colmar - Musée Unterlinden http://www.musee-unterlinden.com/joe-downing.html Grenoble - Musée des Beaux Arts Toulouse - Musée des Augustins Dijon - Musée des Beaux Arts Saint-Etienne - Musée d'Art et d'Industrie Mâcon - Musée des Beaux Arts Bayeux - Musée Baron Gérard BELGIUM Verviers - Musée des Beaux Arts LUXEMBOURG Luxembourg - Musée National d'Histoire et d'Art ISRAEL Jerusalem - Bez Alel Museum UNITED STATES Bowling Green KY - Joe Downing Museum New York, N.Y. - Museum of Modern Art Cincinnati, Ohio - Cincinnati Art Museum Washington, D.C. - Smithsonian Institute Louisville, Ky - J.B. Speed Art Museum Seattle, Wa - Seattle Art Museum Charleston, W.Va - Municipal Art Galerie Owensboro, Ky - Fine Art Museum Rockland, Maine - Farnsworth Museum CANADA Montréal, Québec - Musée d'Art Contemporain Vancouver, British Columbia - Fine Arts Gallery of Greater Vancouver AUSTRALIA Sydney - National Fine Arts Gallery of New South Wales |
Principales galeries : |
1953-1958 1958-1978 Depuis 1973 Depuis 1974 Depuis 1976 1978-1983 Depuis 1983 Depuis 1984
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Joe Downing aquarelle 12 x 16 cm de 2002 |
Expositions personnelles depuis : |
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1999 2001 2002 2004 2005 2007 2008 2010 |
Hommage à Joe Downing |
Peintre, il avait choisi la France. Et ce sud dont les chaudes couleurs font vibrer ses tableaux. Joe Downing, dont les œuvres figurent dans les collections publiques du Musée national d’art moderne et du Musée d’art moderne de la Ville de Paris, s’est éteint le 29 décembre. Il avait 83 ans. On apprenait à aimer “Joe”, homme lumineux, tout comme sa peinture. En passant d’un émerveillement à l’autre, en s’étonnant de le voir se renouveler sans cesse, puisant au fond de lui comme à une source de jouvence jamais tarie. Ses toiles kaléidoscopes, peuplées de signes, de myriades de formes, faisaient émerger de grands pans d’invisible, des miroitements, des lumières. |
Remerciements à Pascal Lainé qui a fait un travail considérable sur l'artiste depuis de nombreuses années et nous a permis de réaliser cette biographie sur cet artiste important dans l'histoire de l'art.
Galerie Pascal Lainé 3, rue Sainte Barbe 84560 Ménerbes T.:+33(0)4.90.72.48.30. P.:+33(0)6.61.89.74.12. Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. |