Lucio Fontana Musée Guggenheim Bilbao

MUSEES - FONDATIONS - INSTITUTIONS

Lucio Fontana
Sur le seuil

Dates : du 17 mai au 29 septembre 2019
Commissaires : Iria Candela, “Estrellita B. Brodsky” Curator of Latin American
Art, The Metropolitan Museum of Art, New York, avec Manuel Cirauqui,
Curateur, Musée Guggenheim Bilbao.
Musée Guggenheim Bilbao
Avenida Abandoibarra, 2 - 48009 Bilbao, Espagne
https://www.guggenheim-bilbao.eus/

- Les premières oeuvres de Fontana des années 1930 et 1940 illustrent une trajectoire évoluant vers l’abstraction mais perméable aux courants esthétiques qui marquaient ces années complexes. En même temps, elles annoncent déjà la volonté de transgression des toiles lacérées qui domineront sa production ultérieure.

 - L’exposition présente une sélection extraordinaire d’oeuvres de la série iconique des Entailles (Tagli), ainsi que les tous premiers Trous (Buchi ), pièces que leur radicalité situe à la frontière entre peinture, sculpture et action artistique.

 - Avec ses Environnements spatiaux (Ambienti spaziali ) et ses expérimentations avec la lumière et l’espace, en recourant parfois aux tubes de néon, Fontana jette les bases du développement futur de l’art de l’installation et de l’oeuvre d’art immersive.

 

Lucio Fontana (1899–1968) Spatial Concept, Expectations (Concetto Spaziale, Attese), 1959 Oil on canvas with slashes 90.8 × 90.8 cm Olnick Spanu Collection, New York © Fondazione Lucio Fontana, Bilbao, 2019
Lucio Fontana (1899–1968) Concept spatial, Quanta (Concetto spaziale, I Quanta), 1959 Peinture à l'eau sur toile, incisions, 6 parties Dimensions variables Collection privée, Italie © Fondazione Lucio Fontana, Bilbao, 2019
Lucio Fontana (1899–1968)
Concept spatial, Quanta (Concetto spaziale, I Quanta), 1959
Peinture à l'eau sur toile, incisions, 6 parties
Dimensions variables
Collection privée, Italie
© Fondazione Lucio Fontana, Bilbao, 2019
 

- Sur le seuil offre une vision transversale et complète d’un artiste aux prises avec les conflits et les angoisses qui hantèrent une bonne partie du XXe siècle : du réexamen du classicisme par l’avantgarde, de l’esthétique liée aux mouvements totalitaires européens, à la Seconde guerre mondiale et à la réorganisation internationale des mouvements artistiques dans l’après-guerre, jusqu’au raz de marée technologique de l’ère dite spatiale.

Avec Lucio Fontana. Sur le seuil , le Musée Guggenheim Bilbao présente une nouvelle approche sur l’héritage que nous a laissé un des artistes majeurs du XXe siècle. Sur la base d’une sélection rigoureuse d’une centaine d‘objets - sculptures, céramiques, peintures, oeuvres sur papier et environnements réalisées entre 1931 et 1968 - cette exposition met en lumière les différentes périodes du travail de l‘un des créateurs les plus influents de l’après-guerre.

Organisée par le Metropolitan Museum of Art de New York, en collaboration avec la Fondazione Lucio Fontana de Milan et le Musée Guggenheim Bilbao, l’exposition permet de (re)découvrir des pièces majeures de la carrière de l’artiste, depuis ses sculptures des débuts jusqu’à ses environnements et installations faisant appel à des lumières artificielles de diverses couleurs. Déployant une vision panoramique et complexe, Sur le seuil resitue la radicalité des séries les plus iconiques de Fontana, comme les Entailles et les Fin de Dieu (Fine di Dio), dans le contexte d’une trajectoire d’une grande actualité et d’un très grand rayonnement international.


Lucio Fontana (1899–1968) est surtout célèbre pour ses toiles entaillées, mais ce n’est qu’en 1949, après deux décennies de pleine activité, qu’il utilise la toile pour la première fois. À partir de 1958, le geste radical avec lequel il lacère la peinture monochrome, l’ouvrant ainsi à l’absolu de l’espace, devient systématique.
Le cutter devient alors l’instrument qui déverrouille le plan bidimensionnel de la peinture pour y faire intervenir une profondeur quasi mystique. L’exposition Sur le seuil permet de retracer l'origine de ces formes et gestes essentiels dans les périodes de formation et d'expérimentation de Fontana, ainsi que d'observer les influences que différents mouvements artistiques importants en Italie et en Argentine eurent sur sa pratique, parmi lesquels le futurisme, le néoclassicisme et le mouvement MADI.

Lucio Fontana (1899–1968) Concept spatial, Attente (Concetto spaziale, Attesa), 1959 Papier entoilé, incision 118 × 88 cm Collezione Prada, Milan © Fondazione Lucio Fontana, Bilbao, 2019
Lucio Fontana (1899–1968)
Concept spatial, Attente (Concetto spaziale, Attesa), 1959
Papier entoilé, incision
118 × 88 cm
Collezione Prada, Milan
© Fondazione Lucio Fontana, Bilbao, 2019
 
Les premières sculptures
Lucio Fontana commence sa carrière comme sculpteur à Rosario (Argentine) au milieu des années 1920 dans l’atelier de son père, Fontana et Scarabelli, où il réalise des sculptures funéraires pour les cimetières d’une ville abondamment peuplée d’immigrants italiens. Le jeune artiste s’installe ensuite à Milan pour se former à la sculpture classique à l’Académie des Beaux-arts de Brera, mais fait rapidement preuve d'une certaine irrévérence envers l’académie, préférant le modelage au travail au ciseau. Au cours des années trente, il développe sa carrière en Italie, en situant au centre de sa pratique la sculpture et le relief en plâtre, terre cuite ou céramique. Dans le style figuratif, Fontana adopte une posture réaliste, matérique et hautement expressive, inspirée des sculptures antiques des sarcophages étrusques, comme nous pouvons le voir dans ses portraits féminins, certains rehaussés par des couleurs ou de l’or. Toutefois, Fontana est un artiste éclectique qui absorbe la tradition et assimile les mouvements de l’avant-garde, comme le Futurisme, ce qui lui permet de maintenir une certaine singularité esthétique sous le régime fasciste en Italie. Dans son travail avec l'argile, Fontana réussit à fusionner les genres, les thèmes et les références historiques, tout en repoussant les limites de la pratique sculpturale.
Lucio Fontana (1899–1968) Concept spatial, New York 10 (Concetto spaziale, New York 10), 1962 Trois panneaux de cuivre, fentes, grattages 94 × 234 cm Fondazione Lucio Fontana, Milan © Fondazione Lucio Fontana, Bilbao, 2019
Lucio Fontana (1899–1968)
Concept spatial, New York 10 (Concetto spaziale, New York 10), 1962
Trois panneaux de cuivre, fentes, grattages
94 × 234 cm
Fondazione Lucio Fontana, Milan
© Fondazione Lucio Fontana, Bilbao, 2019
 
Matière
À partir du milieu des années cinquante, Fontana s’empare de matériaux réfléchissants comme les paillettes ou le verre pour ses peintures perforées. Pour cela, il se fait envoyer de grandes quantités de verre de Murano à son atelier de Milan, où il les casse en éclats. Dans la série Pierres (Pietre ), Fontana exploite les particularités du verre pour projeter la surface de la peinture dans l’espace de l’observateur.
Quant à la série Huiles (Olii), débutée en 1957, elle se caractérise par de puissants empâtements qu’il crée en appliquant à la spatule de larges franges de peinture à l’huile directement du tube jusqu’à obtenir une finition brillante. Les Trous (Buchi ), les Pierres , les Huiles et les autres cycles picturaux des années cinquante sont très proches de l’Art informel, en raison de sa pratique mi-picturale mi-sculpturale, parallèles à ceux du modelage de l’argile. De fait, en 1959 Fontana entreprend à Albissola une série de sculptures colorées intitulée Nature (Natura ). L’artiste décrit ces grandes et grossières boules de terre cuite percées et fendues comme « le néant, ou le commencement de tout ». La marque des doigts de Fontana, encore visible sur quelques pièces de ces séries, exprime bien son lien physique avec le matériau.
Entailles

Dans le contexte de la renaissance économique italienne de l’après-guerre, de la course spatiale et la menace nucléaire croissante de la Guerre froide, Fontana crée ses oeuvres les plus célèbres : les Entailles (Tagli). En déchirant le plan pictural, le geste radical que supposent les Entailles constitue un acte de sabotage pour la discipline de la peinture. Fontana présente au spectateur une forme littéralement faite d’espace. En 1958 il réalise sa première peinture lacérée et affine rapidement sa technique : appliquant d’abord, généreusement, une couche de peinture uniforme sur la toile, pendant qu’elle est encore humide, il la fend avec un cutter. Une fois que la peinture est sèche, il donne forme à l’entaille directement avec les mains. La dernière étape consiste à fixer celle-ci avec un fragment de gaze noire qu’il colle à l’arrière. En 1959, il se lance dans une série de peintures à base d’hexagones, de pentagones, de cercles et autres périmètres irréguliers. Leurs surfaces dynamiques amplifient le champ de couleur monochrome à l’espace environnant, comme c’est le cas de Les Quanta, de petites peintures irrégulières disposées au mur comme
un ensemble. Dans le cas de la série La fin de Dieu, des “oeufs astraux” à base de couleurs synthétiques suggèrent l’idée d’un cosmos inconcevable et d’un espace infini.

Lucio Fontana (1899–1968) Concept spatial, le pain (Concetto spaziale, il pane), 1950 Terre cuite, incisions 42 × 33 × 3,5 cm Fondazione Lucio Fontana, Milan © Fondazione Lucio Fontana, Bilbao, 2019
 
Éléments réfléchissants
Pendant toute sa carrière, Fontana a expérimenté avec les matériaux et les surfaces réfléchissantes. Ses céramiques des années trente exploitent déjà les effets lumineux des vernis, de la feuille d’or et de la mosaïque, et dans ses peintures il a recours à des fragments de verre, à la peinture brillante et à l’or et l’argent. L’artiste est fasciné par le doré, utilisé tout le long de l’histoire de l’art dans quelques-uns de ses objets les plus raffinés et dont l’énigmatique reflet métallique était associé au divin et à la vie dans l’audelà.
Les dorures prolifèrent à l’époque baroque et sont omniprésentes dans les motifs architecturaux et ornementaux des églises et des cathédrales dans le sillage de la Contre-réforme. Après son premier voyage à New York en 1961, Fontana s’inspire des gratte-ciels de Manhattan et commence à utiliser des matériaux comme le cuivre, le laiton et l’aluminium dans une série intitulée Métaux (Metalli ). La lumière qui frappe directement ces surfaces brillantes revient vers l’observateur en inondant l’architecture environnante, tandis que l’effet de miroir décompose le reflet du spectateur dans l’oeuvre même. Ces matériaux permettent à l’artiste de poursuivre son exploration des possibilités inclusives du tableau, ainsi que de sa profondeur et de sa relation physique avec l’observateur.
Lucio Fontana (1899–1968) Concept spatial (Concetto spaziale), 1954 Huile, encre et éclats de verre sur toile 70 × 49,5 cm Collection privée, Italie © Fondazione Lucio Fontana, Bilbao, 2019
Lucio Fontana (1899–1968)
Concept spatial (Concetto spaziale), 1954
Huile, encre et éclats de verre sur toile
70 × 49,5 cm
Collection privée, Italie
© Fondazione Lucio Fontana, Bilbao, 2019
Environnements spatiaux
Avec son mouvement qu’il baptise Spatialisme —dont il rédige le Manifeste blanc (Maniifiesto blanco)—, Fontana recherche la synthèse des arts. Dans une démarche multidisciplinaire, il élargit le champ de l’expérience artistique pour englober l’espace dans sa totalité. Il est un pionnier des installations immersives —qu’il baptise Environnements spatiaux (Ambienti spaziali )— et des expérimentations avec la lumière électrique dans l’espace, y compris de l’emploi des tubes de néon. Dans Sur le seuil figurent la reconstruction de la monumentale arabesque de néon intitulée Structure de néon pour la IXe Triennale de Milan (1951), ainsi que deux installations immersives jamais exposées auparavant en Espagne :
Environnement spatial : “Utopies”, à la XIIIe Triennale de Milan (1964) et Environnement spatial à la lumière rouge (1967). Ces trois pièces, conçues sur une période de plus de quinze ans, montrent bien le caractère précurseur des expérimentations de Fontana dans sa quête de l’oeuvre d’art totale. Avec ces propositions, Fontana ouvre la voie aux développements ultérieurs autour du caractère enveloppant dans l’art contemporain, dans lequel la sculpture, la lumière et l’architecture se fondent pour transcender la traditionnelle division des disciplines artistiques.

Catalogue

Un catalogue illustré accompagne l’exposition dans lequel différents experts internationaux analysent le
travail de l’artiste, ses origines par rapport aux contextes argentin et italien, ainsi que la diversité et
l’expansion internationale de ses dernières recherches jusqu’à sa mort en 1968. Outre une iconographie
détaillée de l’exposition, la publication offre de nombreuses images d’archives des environnements, des
commandes publiques et de l’atelier de l’artiste qui couvrent quatre décennies de production. Un nouveau
regard est ainsi proposé sur une oeuvre qui nous situe sur le seuil des grandes questions qui ont agité le
XXe siècle.