À vrai dire, ils ne constituent des états multiples que lorsque je les ai déjà dépassés et que je me retourne en arrière pour en observer la trace. Tandis que je les éprouvais, ils étaient si solidement organisés, si profondément animés d’une vie commune, que je n’aurais su dire où l’un quelconque d’entre eux finit, où l’autre commence. En réalité, aucun d’eux ne commence ni ne finit, mais tous se prolongent les uns dans les autres. »*
L'intuition se placerait dans la mobilité. Aussi, comment traiter cette idée de choses mouvantes? Les artistes de cette exposition exploitent la mutation des différents états de la création; l'œuvre mutant elle-même en une chose incertaine. Eva HILD façonne de ses mains la matière pour en créer des corps mouvants, alors que Mélanie BERGER use de l'animation abstraite afin de narrer le concept de révolution. James BROWN, dans The Realm of Chaos and Light crée une constellation d'étoiles et des vagues de nuages. Il en dévoile le caractère cellulaire, organique et changeant. Dans l'œuvre Je suis un poisson dans l'encre... , Christian DOTREMONT saisit la nature matérielle de l’écriture ; le poème s’infuse alors en logogramme. Chez Paul KLEE, une combinaison de lignes et de taches flottantes dégage les contours d’un personnage imaginaire qui semble pris au piège d’un réticule de points. Dans cette exposition, les choses mouvantes se contemplent dans le point, la trace, la tache, le feu d’artifice, la sculpture et l’animation. La pensée faite d’assemblages abstraits et aléatoires, permute alors la permanence des choses en une myriade de repères mouvants.
*Henri BERGSON, La Pensée et le mouvant, Essais et conférences, Presse Universitaire de France, Paris, 1934, Chapitre VI, p.183
« What I find beneath these clear-cut crystals and this superficial congelation is a continuity of flow comparable to no other flowing I have ever seen. It is a succession of states each one of which announces what follows and contains what precedes. Stickly speaking they do not constitute multiple states until I have already got beyond them, and turn around to observe their trail. While I was experiencing them they were so solidly organized, so profoundly animated with a common life, that I could never have said where any one of them finished or the next one began. In reality, none of them do begin or end; they dove-tail into one another. »*
The intuition would take place in mobility. In addition, how to deal with this idea of changing things? The artists in this exhibition exploit the mutation of the various states of creation; the work itself mutating in an uncertain thing. Eva HILD shapes from her hands the material to create moving bodies, while Melanie BERGER uses abstract animation to tell the concept of revolution. James BROWN, in The Realm of Chaos and Light, creates a constellation of stars and waves of clouds. It reveals a cellular, organic and changing character. In the work Je suis un poisson dans l’encre, Christian DOTREMONT has caught the material nature of writing; the poem then infuses in logogram. With Paul KLEE, a combination of lines and floating spots identifies the contours of an imaginary character that seems trapped in a reticule made of points. In this exhibition, moving things can be contemplate in focus, track, spot, fireworks, sculpture and animation. The thought made of abstract and random assemblages, then switches the permanence of things in a myriad of moving markers.
*Henri BERGSON, The Creative Mind: An Introduction to Metaphysics, 1946, (La Pensée et le mouvant, 1934) Citadel Press, 2002