1. Alberto Giacometti, Portrait de Marguerite Maeght, 1961. Huile sur toile, 130 x 96,5 cm. Collection Adrien Maeght, Saint-Paul-de-Vence © Succession Giacometti (Fondation Giacometti, Paris et ADAGP, Paris) 2021
2. Alberto Giacometti, Le Chien, 1951. Bronze, 47 x 100 x 15 cm. Collection Fondation Maeght, Saint-Paul-de-Vence © Succession Giacometti (Fondation Giacometti, Paris et ADAGP, Paris) 2021GIOVANNI, AUGUSTO, ALBERTO, DIEGO ET BRUNO
Exposition du 3 juillet au 14 novembre 2021
Du 3 juillet au 14 novembre 2021, la Fondation Maeght propose une première mondiale en réunissant les cinq artistes de l'exceptionnelle famille Giacometti originaire du village suisse de Stampa : Giovanni, Augusto, Alberto, Diego et Bruno Giacometti, cinq artistes aux parcours différents mais entremêlés. Sous le commissariat de Peter Knapp, l'exposition « Les Giacometti : une famille de créateurs » invite à découvrir les talents et les influences artistiques de chacun dans leurs domaines de prédilection : peinture, sculpture, design et architecture.
« Évidemment, tout le monde connaît Alberto
mais moi j'avais envie d'exposer pour la première fois
les cinq artistes de cette famille créative.
En les exposant tous ensemble, j'espère
faire connaître les prénoms des quatre autres. »
Peter KnappCette exposition originale permet de découvrir à travers plus de 300 œuvres l'importance de cette famille dans le tournant de la modernité de la première moitié du XXe siècle. Autour d'Alberto Giacometti, le plus connu de la famille pour ses sculptures emblématiques, les visiteurs pourront découvrir le travail de son père Giovanni, dont les peintures recèlent une puissance chromatique extraordinaire et qui compte, avec Ferdinand Hodler, Cuno Amiet et Félix Vallotton, parmi les peintres phares de la modernité suisse. L'exposition met également en lumière l'œuvre d'Augusto, cousin d'Alberto, précurseur de l'art non figuratif, qui amorce avec ses premiers pastels réalisés à Paris au début du XXe un langage personnel abstrait et coloré ; l'œuvre de ses deux frères, Diego son cadet, l'autre « paire de mains » et modèle de prédilection d'Alberto, qui s'illustra notoirement dans la création de pièces d'arts décoratifs et Bruno, le plus jeune, qui exerça le métier d'architecte et dont la vaste production en fit un représentant majeur de la modernité d'après-guerre en Suisse. La relation intime que chacun d'eux entretient avec leur village natal, Stampa, dans le canton des Grisons en Suisse, devenu aujourd'hui un lieu incontournable de l'histoire de l'art moderne, est mise en exergue tout au long de l'exposition.
3. Augusto Giacometti, Mein Vater (Mon père), 1912. Huile sur toile, 36,5 x 32,5 cm. Collection Particulière. Photo Bündner Kunstmuseum Chur 4. Augusto Giacometti, Landschaft (Baum), 1912. Huile sur toile, 68 x 68 cm. Collection particulière. Photo Peter Schätchli, Zürich |
Les sculptures et dessins d'Alberto Giacometti appartenant à la collection de la Fondation Maeght, seront accompagnés par un ensemble de peintures, films, photographies d'archives et objets provenant des collections privées ou de musées comme le Bündner Kunstmuseum de Chur (Suisse), le MASI à Lugano (Suisse), le Kunstmuseum de Bâle (Suisse), le Musée des Arts Décoratifs (Paris) et la Fondation Giacometti (Paris). |
Entretien avec Peter Knapp, commissairepar Lydia Harambourg |
Lydia Harambourg : Pouvez-vous nous dire ce qui a motivé le projet de l'exposition à la Fondation Maeght ? Peter Knapp : L'enthousiasme d'Adrien et d'Isabelle Maeght et l'envie de réunir dans un musée pour la première fois au monde les cinq Giacometti sont à l'origine de ce projet. L'élément déclencheur a été la question d'un journaliste me demandant qui étaient Diego et Giovanni. Cette interrogation m'a fait mesurer l'ignorance du public pour cette famille créative si particulière. J'ai alors conçu avec Beat Stutzer un ouvrage réunissant les cinq membres de la famille : Giovanni le père, son cousin Augusto, tous deux peintres, et les trois fils de Giovanni, Alberto, Diego et Bruno afin de redonner à chacun d'eux une place dans le contexte artistique et historique qui fut le leur au XXe siècle. J'avais à l'époque pris contact avec Adrien Maeght avec qui je voulais faire le livre. Des circonstances imprévues ont orienté autrement la publication qui a été réalisée en 2017 aux éditions du Chêne. L.H. : Une exposition consacrée aux cinq Giacometti, en quoi présente-t-elle un caractère inédit et exceptionnel ? P.K. : Pour la première fois, grâce à des prêts de collectionneurs privés ou de musées, seront exposées ensemble des peintures de Giovanni et d'Augusto, inconnues en France, mais aussi des plans et maquettes de Bruno accompagnés de mobilier réalisé par Diego. |
5. Diego Giacometti, Chat Maître d'Hôtel, 1967. Bronze patiné, H : 30 cm. Collection particulière, Paris. © ADAGP, Paris 2021 |
L.H. : Les liens étroits qui unissaient Alberto et Diego avec la famille Maeght expliquent la présence de chefs-d'œuvre des deux frères au sein des collections de la Fondation Maeght. À partir de ce fonds emblématique, comment avez-vous effectué le choix des œuvres ? P.K. : La collection des œuvres d'Alberto et Diego qui appartiennent à la Fondation Maeght et à la famille Maeght constitue la base de cette exposition. S'ajoutent quelques pièces empruntées que j'ai découvertes lors de mes recherches pour cette exposition. Quant aux œuvres de Giovanni, Augusto et Bruno, inconnues du public international, j'ai prospecté dans les musées et collections privées, autant de raisons qui en font la révélation que constitue cette exposition. |
7. Giovanni Giacometti, Sotto il Sambuco, 1911. Huile sur toile, 76 x 96,5 cm. Collection particulière. © SIK-ISEA, Zurich (Martin Stollenwerk) 8. Giovanni Giacometti, Il Pittore, 1921. Huile sur toile, 111 x 81 cm. Collection particulière, Suisse, © 2016 Christie's Images Limited. |
L.H. : Pouvez-vous nous parler de la conception historiographique et si celle-ci a déterminé le parcours de l'exposition ? Est-il biographique, chronologique ou bien avez-vous tissé des correspondances ou des croisements pour une approche inattendue, renouvelant notre regard ? P.K. : L'exposition commence avec Giovanni en 1888 et finit avec Diego en 1985. Ni la chronologie, ni la biographie ne sont respectées. Chaque artiste a une salle. Mais quand le sujet, la chronologie et les dates suggèrent une ressemblance, voire une collaboration (Alberto, Diego), nous avons établi des rapprochements. L'histoire de cette famille de créateurs couvre un siècle de l'art moderne. |
9. Bruno Giacometti, Dessin de l'hôtel de ville d'Uster (Stadthaus), 1961. Collection : Stadtarchiv & Kläui Bibliothek Uster © Stadtarchiv & Kläui Bibliothek Uster, Gemeindearchiv, Neubau Gemeindehaus, C.V.10 10. Bruno Giacometti, Maquette pour le pavillon suisse à la Biennale de Venise, circa 1951. Matériaux divers, 11,5 x 56 x 31 cm. Propriété de la Confédération Suisse, Office fédéral de la culture, Berne. |
L.H. : Cette exposition est un rêve qui trouve sa réalité dans un lieu dédié à l'art du XXe siècle voulu par ses fondateurs. Aujourd'hui c'est un hommage ému que vous lui rendez ainsi qu'à sa famille. P.K. : J'ai rencontré pour la première fois Alberto à La Coupole, fréquentée quotidiennement par l'artiste, lorsque j'étais étudiant aux Beaux-Arts de Paris, mais je n'avais pas osé l'aborder. C'est à la Biennale de Venise de 1956 que j'ai eu le bonheur de lui parler. Il s'est montré très accessible et m'a expliqué d'où venait la maigreur de ses figures. Par la suite, il m'a invité à son atelier rue Hippolyte-Maindron à Paris. Je remercie Adrien et Isabelle Maeght de m'avoir donné la possibilité de présenter, avec leurs plus illustres parents, Giovanni qui a fait partie du mouvement « Die Brücke » et Augusto qui compte parmi les premiers à créer des œuvres chromatiques informelles et qui a exposé avec Kandinsky, tous deux des oubliés de l'histoire de l'art. |