25 mai – 29 septembre 2024 – texte de Julia Cserba
Dans le cadre du 5ème Festival Normandie Impressionniste nous avons visité une exposition inquiétante à un lieu étonnant. Aussi bien l’artiste que le lieu ont réussi à nous ébahir, bouleverser et faire réfléchir.
L’Abbaye de Jumièges, comme on l’appelle « la plus belle ruine de France », était un des plus importants monastères bénédictines de Normandie. Son histoire remonte au 1er siècle et depuis il a connu aussi bien des beaux jours que les invasions, les pillages, les dévastations et les reconstructions en répétition. Aujourd’hui en ruine mais conservé avec compétence, la façade avec ses deux tours d’une hauteur de 50 mètres, les restes de l’imposante nef romaine de 11ème siècle, les voutes gothiques et les restes des autres parties d’Abbaye nous permets par notre imagination de reconstituer le bâtiment et son vécu. Déambulant dans le dédale de cette immense vestige, ici et là nous découvrirons les œuvres de artiste français, Laurent Grasso, qui partage sa vie entre Paris et New York. Le titre « Clouds Theory » de son exposition actuelle à Jumièges « évoque le geoengineering et la théorie sur les nuages d’Hubert Damisch. Il porte en lui l’idée d’un trouble du réel, de la perception, l’idée de plusieurs phases d’une même réalité » - explique l’artiste. Tout au long de la nef il a posé au sol six « nuages » en cuivre de deux mètres de long. Les nuages quelquefois beaux, quelquefois menaçants, que nous admirons à regarder et à observer au ciel, chez Grasso, comme s’ils auraient tombé du ciel effondré, incarnent les tragédies humaines, les guerres, les catastrophes naturelles de nos jours et du futur. Pour créer des œuvres pour ce site, Grasso a étudié son histoire, « considérant le lieu comme une porte magnétique entre le passé et le futur ». Il a créé une série de dates en néon : des dates qui ont marqués le passé de ce lieu (841 : invasion Viking, 1358: Guerre de Cent Ans …), des dates des évènements de notre époque (2020 : Pandémie de Covid-19) et du futur, comme du 2046, l’année du passage de l’astéroïde 2023DW à proximité de la Terre. Dispersés dans le labyrinthe des ruines, à part ses dates, des flammes et des yeux en néon ont également trouvé leurs places sur les murs en créant une atmosphère à la fois poétique et inquiétante.
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