DESCRIPTION DES FETES DONNEES PAR LA VILLE DE STRASBOURG POUR LA CONVALESCENCE DU ROI

Documents historiques

REPRESENTATION DES FETES DONNEES PAR LA VILLE DE STRASBOURG, pour la convalescence du Roi ; à l'arrivée et pendant le séjour de Sa Majesté en cette ville. Inventé, dessiné et dirigé par Johann Martin Weis (1711 Strasbourg-1751). et gravé par Marvye ou Marvie. Grand in-folio 61 x 46 cm,  gravure le retour du Pont du Rhin. TRES BEAU DOCUMENT PUBLIE PAR LA VILLE DE STRASBOURG pour commémorer les fêtes qu'elle offrit du 5 au 10 octobre 1744 en l'honneur de Louis XV.
Il est orné d'un titre dans un encadrement rocaille, du retour des armées au retour du pont du Rhin. Le texte, qui comprend 20 pages gravées dans des encadrements, est orné d'une grande vignette et d'un cul-de-lampe gravés par Marvie.

Prix : 900 EUR

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DESCRIPTION DES FETES DONNEES PAR LA VILLE DE STRASBOURG POUR LA CONVALESCENCE DU ROI : A L’ARRIVEE ET PENDANT SON SEJOUR DE SA MAJESTE EN CETTE VILLE

La Ville de Strasbourg n’avoit pas joüi du bonheur de voir son Souverain depuis le 23. Octobre 1681, jour au quel Louis XIV. Fit son entrée dans cette Capitale d’Alsace qui venoit de se soumettre à ses lois.
L’Espérance d’un spectacle si rare pour elle ; la reconnaissance qu’elle devoit à un Roi, qui suspendoit la rapidité de ses Conquêtes pour voler à son secours ; sa gratitude envers le Ciel, qui venoit se sécher ses larmes en lui rendant un Monarque chéri, avoient rempli le cœur de tous ses habitans de la joye la plus vive.

Elle éclata à la nouvelle de la convalescence du Roi par les actions de graces que l’on rendit à celui qui tient dans sa main le cœur et la vie des Rois. Le TE DEUM fut chanté le 20. Septembre dans l’Eglise Cathédrale au bruit d’une triple décharge de canon de la Ville, de la Citadelle et des Forts, et de la mousqueterie des Troupes qui bordoient les Remparts. Tous les Corps Ecclésiastiques et Séculiers y assistérent. Le superbe Clocher de la Cathédrale fut Illuminé, toutes les Maisons l’étoient de même : chacun chercha à se surpasser dans ces Illuminations. Celle de la façade de l’Hôtel de Ville fut des plus brillantes et des mieux entendües. Le Magistrat ordonna des distributions de pain et de viande pour le Peuple : il fit élever au devant de l’Hôtel de Ville, et sur la Place d’Armes deux édifices en forme d’Arcs Triomphaux chargés des Armes et des Chiffres du Roi, d’Emblêmes, et d’autres Décorations ; à l’un de ces Edifices étoient placés deux Cignes, et deux Dauphins à l’autre ; du bec de ces Oyseaux et des nazeaux des poissons coiloient des Fontaines de vin blanc et de vin rouge.

M. le Marquis de la Farre qui commandoit en l’absence de M. le Maréchal de Coigny, donna le même jour un repas splendide aux Princes et aux Princesses qui étoient alors à Strasbourg. La Noblesse et les personnes de distinction y furent invités. La Place, l’Hôtel et les Jardins étoient éclairés d’une multitude infinie de lampions.

Le lendemain 21. M. Le Prince de Rohan Vantadour, à présent Cardinal de Soubize, Coadjuteur de l’Evêché de Strasbourg, donna sa Fête au Palais Episcopal ; l’éclat et la somptuosité de cette fête répandoient à la magnificience du lieu, et à la dignité du Maître.
M. de Vanolles Intendant d’Alsace, se distingua aussi par un grand souper qu’il y eut chez luy le 22, et par des décorations et des Illuminations qui formoient un objet agréable à la vüe, en se répétant dans les eaux de la riviére d’Ill, sur laquelle elles étoient placées.
M. de Klinglin, préteur royal, et MM. les Magistrats firent la clôture de ces premiéres Fêtes par un repas également somptueux et délicat ; par des Illuminations, qui rangées en compartimens sur les remparts vis à vis l’Hôtel de M. le Préteur Roial où se donnoit cette Fête, représentoient tous les ornemens d’un beau Parterre, audessus du quel étoient placés des Feux et des Artifices, dignes du gout decidé pour le beau, de celui qui l’avoit ordonné.


Le jour de l’arrivée du Roi ayant été fixé au 5 d’Octobre, tout se mit en mouvement. Le Magistrat, le Négociant distingué, le Marchand, le simple Artisan temoignèrent à l’envie leur empressement à se signaler en cette occasion. Cette émulation passa jusqu’aux Enfans. Pour satisfaire une ardeur si louable, on choisit dans le grand nombre douze à quatorze cens hommes, que l’on distribua en différentes compagnies.

L’une des jeunes garçons de douze à quinze ans, habillés en Cent Suisses d’un uniforme de camelot bleu, chargé sur toutes les tailles de rubans de soye rouges et blancs, avec la fraize, la hallebarde, le chapeau, le plumet et le reste de l’ajustement à la Suisse. Le fils de M. de Mullenheim, un des Staettmeistres de la Ville, habillé à la Françoise selon l’ordonnance des Officiers des cent Suisses de la garde ordinaire du Roy, d’un habit bleu galonné en or sur toutes les coutures, étoit à la tête de cette Compagnie, il avoit sous lui le Fils de M. Hammerer Ammeistre Regent de cette Ville et deux autres Officiers Fils de M. Wetzel Magistrat de la Chambre des Quinze et de M. Zoepffel aussi Magistrat du nombre des Vingt-un et un Porte Enseigne, tous habillés comme le chef. Trois autres Officiers subalternes vétus comme la troupe, la conduisoient et lui faisoient faire les différentes évolutions de l’exercice des Cens Suisses. On forma une compagnie de Hussards composée de jeunes gens des mieux faits : ils étoient habillés d’écarlate avec des boutonss et des agrémens d’argent. Le bonnet de pêau d’ours avec le fonds de drap bleu, un passepoil d’argent sur les coutures, et une houppe d’argent à la pointe. La housse, les chaperons des pistolets de drap bleu bordé d’argent ; la ceinture, le Sabre, la bottine le cheval et tout le surplus de l’équipage étoient à la hussarde. Les deux Officiers de cette Troupe étoient en velours cramoisi avec des galons et franges d’argent, ils avoient seuls des manteaux qui étoient de velours bleu, galonnés et doublés de martres. Les Sabres de ces deux Officiers étoient montés en argent et garnis de pierreries. Le bonnet, la bottine, l’écharpe répondoient à cette magnificence. Les ornemens des Officiers inférieurs étoient proportionnés à leurs grades.

L’Elite de la Bourgeoisie se partagea en quatre Escadrons de Cavallerie, et en trois Bataillons d’Infanterie : le premier Escadron en habit de camelot rouge, à boutonniéres d’or et de boutons dorés un collet de velours noir tressé en or sur les bords et des vestes d’écarlate galonnées en plein de galons à la Mousquetaire : les chapeaux bordés d’or avec des plumets blancs. Les Housses et les chaperons d’écarlate bordés d’or, le bridon rouge, les crins de cheval nattés d’un cordon de soye rouge, se terminant sur le col du cheval par une grosse houppe. L’Eppée d’argent en dragonne or et soye, la botte à l’angloise, les éperons de cuivre et les pistolets garnis de même. MM. de Boulach et de Berckheim, Capitaines au Regiment Royal Allemand et Magistrats Nobles de la Chambre des Quinze, avec M. Gambs aussi Magistrat de la même Chambre, étoient à la tête de cet Escadron avec des habits d’écarlate richement galonnés en brandebourgs d’or avec des glands à la pointe de chaque brandebourg. Un autre Escadron de Cavalerie, habillé de même couleur avoit en argent les mêmes ajustemens que le précedent en or. Un Echevin de la tribu galonné en brandebourgs d’argent, commandoit cet escadron.
L’uniforme du troisiême corps étoit un habit de camelot bleu avec des tresses et des boutons d’argent, le collet de velours noir tressé en argent, la veste d’un drap ventre de biche à galons et boutonniéres d’argent. Les Officiers pris des plus anciens Echevins de la tribu, et Conseillers au Magistrat avoient des galons d’argent de quatre doigts de large sur l’habit. Les chapeaux de la Troupe bordés d’argent avec des plumets blancs. Les chevaux en housses et chaperons d’écarlate galonnés en argent.

Le quatriême Escadron étoit vétu d’un camelot gris cendré avec le collet de velours noir, le tout en tresses d’argent : la veste ventre de Biche bordée d’un galon ; les Officiers étoient en brandebourgs : le surplus de leur ajustement étoit conforme à celui des autres escadrons.

La premiére Troupe d’Infanterie étoit composée de cinq Compagnies, dont une de grenadiers. Leur uniforme étoit un habit de drap bleu avec des boutonniéres d’or et des boutons dorés : la veste d’écarlate galonnée d’or en plein : le chapeau bordé de même. Les Grenadiers avec des bonnets de peau d’ours, le fonds d’écarlate une grenade en flamée brodée en soye et argent sur le devant. M. de Berstoett Conseiller noble, et M. Lemp Vingt un, premiers Officiers de cette Troupe étoient superbement galonnés d’un galon d’or, régnant le long des tailles du devant et du derriére, sur les manches et les poches et formant les boutonniéres en brandebourgs : la veste de soye galonnée en plein : les boutons de trait d’or : les chapeaux en points d’Espagne. Les Officiers des Grenadiers en bonnets d’un fonds de velours rouge galonné sur les coutures, et terminé par une houppe d’or avec la grenade brodée toute en or sur le devant. L’Uniforme des autres Officiers étoit garni de simples brandebourgs, ou de points d’Espagne, et se distinguoit par la largeur et la disposition du galon.

Le second corps d’Infanterie divisé en trois Compagnies, dont une de Grenadiers, étoit commandé par M. d’Oberkirch Conseiller Noble, sous lequel il y avoit encore vingt autres Officiers, des Principaux de la Tribu, deux sergents, un Fourier et quatre Cadets. Cette Troupe étoit habillée d’écarlate avec des boutonniéres d’or les boutons dorés, le collet de velours noir tressé d’or. La veste de même étoffe que l’habit, et galonné en plein. Les chapeaux bordés d’or. Les bonnets des Grenadiers de peau d’Ours à fonds d’écarlate tressé d’or sur les coutures et terminé par une houppe or et soye, La grenade en flammée brodée en or sur le front du bonnet. L’habit du Commandant étoit chargé sur toutes les coutures d’un galon d’or en lames ; ceux des Capitaines galonnés de même jusqu’à la taille seulement, ceux des Lieutenants en brandebourgs de broderie, et ceux des autres Officiers à proportion de leurs grades. Les chapeaux bordés de points d’Espagne. Les bonnets des Officiers des Grenadiers à fonds de velours cramoisi, galonné sur les coutures, une houppe d’or à la pointe, et la grenade brodée comme le reste de la compagnie.

Deux Compagnies d’Ouvriers l’une de grenadiers, l’autre de Fantasins, qui formoient le troisieme Bataillon, avoient pour Commandant M. Zoepffel Vingt un et sous lui cinq autres Officiers. L’Uniforme des soldats étoit d’un drap gris de perle pour l’habit, avec un bouton d’argent et le collet de velours noir tressé en argent : la veste d’un drap marron, avec un bordé d’argent. Les Officiers avoient les boutonniéres de l’habit en brandebourgs de points-d’espagne jusqu'à la taille et la veste galonnée en plein ; le Commmandant étoit galonné sur toutes les coutures et des brandebourgs formés du même galon. Les chapeaux des Officiers étoient bordés de points-d’Espagne. Le Soldat avoit un simple bord. Les Grenadiers avoient des bonnets de peau d’Ours à fonds de drap maron galonnés sur les coutures et terminés par une houppe soye et argent, sur le devant des bonnets étoient brodés en argent un compas et deux haches, les manches des haches en or. Ils portoient le fusil en bandouliére, une hache sur l’epaule, et devant eux des tabliers de peau, bordés d’un galon ou d’une frange d’argent.

Toutes ces Troupes, tant d’Infanterie que de cavalerie, portoient la cocarde blanche, avec des gands blancs. Les Officiers d’Infanterie étoient en plumets blancs, avoient l’esponton et le hausse-col. Les Soldats étoient en guêtres blanches, avec le fusil, ayant une grenadiére de soye rouge, la bayonette, l’épée, le fourniment, la cartouche. Les Grenadiers étoient en sabres avec des dragonnes repondant à leurs uniformes.

Chaque corps d’Infanterie et de Cavalerie avoit un drapeau ou un étendardt blanc, semé d’une part de fleurs de lis brodées en or, et de l’autre une représentation de la Vierge aussi en broderie, qui est l’ancien Etendart de la Ville de Strasbourg, lequel marchoit à la tête de toutes les Villes libres de l’Empire, aux Entrées Solennelles que les Empereurs faisoient autrefois dans Rome.

Un Timbalier avec ses Timballes garnies de Tabliers de damas cramoisi aux Armes de la Ville brodées en or, et quatre Trompettes habillés en écarlate galonnées d’or en brandebourgs, précédoient la Cavalerie.

Chaque bataillon d’Infanterie avoit à sa tête quatre Haut-bois et autant de Cors de chasse, ce qui pour les trois bataillon faisoit vingt quatre Instrumens, dont seize étoient en habits bleus et les huit autres en écarlate, tous avec des brandebourgs d’or.

Le 5. D’Octobre jour de l’arrivée du Roi sur les dix heures du matin, M. de Klinglin Préteur Royal en habit d’écarlate galonné avec autant de goût que de richesse monté sur un cheval dont l’équipage répondoit à cette magnificence, se mit à la tête de toutes ces Troupes Bourgeoises et les conduisit en ordre jusqu’à l’extrémité du territoire de Strasbourg, hors de la Porte de Saverne par où le Roi devoit arriver, et les posta à la droite du chemin en venant à la Ville : les Hussards un peu en avant pour faire la découverte ; les deux escadrons de Cavalerie en uniforme rouge en suite ; les trois Bataillons d’Infanterie dans le centre ; et les deux autres Corps de Cavalerie terminant la ligne.

Au pied du glacis étoit placé l’Etat Major de la Ville et en suite le Magistrat en Corps composé de vingt quatre Gentils-Hommes et de ses autres membres, la pluspart de familles Patriciennes et des plus anciennes de la Bourgeoisie, tous en habits et en manteaux de cérémonie, et après eux les Bourgeois des vingt Tribus de la Ville aussi en manteaux.

Sur les quatre heures après midy le Carosse du Roi parut environné de ses Officiers et de ses Gardes. Aussitôt l’air retentit du bruit des instruments et des acclamations redoublées de VIVE LE ROI. Les Cavaliers mirent le sabre a la main. M. le Préteur salua le Roi à son poste. Les autres Officiers eurent le même honneur.
Sa Majesté étant arrivée au pied du glacis reçut les trois Clefs de Vermeil, qui lui furent présentées dans un bassin de même Métal par M. le Baron de Trélans Lieutenant de Roi de la Ville.
En même tems le Corps du Magistrat se présenta devant le Roi et eut l’honneur de complimenter Sa Majesté.
Le Roi entra ensuite dans la Ville au bruit de toutes les cloches et de l’Artillerie des remparts.

A l’extrémité du Fauxbourg de Saverne étoit placé un Arc de Triomphe de soixante pieds d’élévation, à trois Arcades, celle du milieu tenoit la moitié de la hauteur de l’Edifice sur dix sept pieds de large. Celles de la droite et de la gauche avoient la moitié de ces dimensions. Audessus de ces deux dernieres, on voyoit à droite un Soleil levant, dont la lumiere rend à la nature sa gayeté et ses ornements, avec cette Devise : VEL VISUS DISSIPAT UMBRAS ; à la gauche, un Torrent qui brise et renverse une digue, paroissant encore plus violent et plus rapide après avoir détruit cet obstacle qui l’arrêtoit, ce qui étoit signifié par ces trois mots : ACUIT MORA CURSUM. La façade de l’Arc se partageoit en huit colonnes d’ordre Corinthien, entre lesquelles étoient représentées, la JUSTICE, la PRUDENCE, la FORCE, et la VALEUR. Au-dessus des Emblêmes et de l’arcade du milieu, étoient des Casques ouverts ornés de trophées. La Statue Equestre du Roi surmontoit l’Edifice, avec cette inscription :
LUDOVICO. XV
FRANCIAE. ET. NAVARRAE
REGI. INVICTO.
PIO. FELICI. AUGUSTO.
PATRI. PATRIAE.
VICTORI. AC. TRIUMPHATORI. HOSTIUM.
TURBATI. RHENANI. LIMITIS. VINDICI.
PACIS. EUROPAEAE. ADSERTORI.

Aux deux côtés de la Statue étoient deux Anges appuyés sur les Ecussons des Armes de France et de Navarre ; et aux deux extrémités, il y avoit des éguilles ou piramides, avec les chiffres du Roi entrelassés de Lauriers : un globe couronné en terminoit la pointe. En dehors de cet Arc de Triomphe, sous lequel le Roi passa, étoient placés les petits Cent-Suisses, qui se présentérent devant Sa Majesté, et lui firent le salut avec une assurance également noble et modeste. De là le Roi marcha vers l’Eglise Cathédrale au milieu d’une double haye des Troupe de la garnison. Les rües qui de ce côté là sont droites et spacieuses, étoient sablées, jonchées de verdure et tapissées à droite et à gauche, des plus belles tapisseries, que les habitans de tout état avoient fournies à l’envie.

A quelque distance de l’Arc de Triomphe le Roi rencontra dix-huit jeunes Bergéres et autant de Bergers, de dix à douze ans, choisis entre ce que la jeunesse de Strasbourg a de plus beau et de mieux fait. Ils étoient en habits de soye blancs ornés de Guirlandes de fleurs et de rubans couleur de rose : les cheveux bouclés et flotans : les houlettes peintes et dorées. Les bergéres portoient de petites corbeilles fort propres remplies de toutes sortes de fleurs ; elles presentérent au Roi leurs hommages innocens sous le simbole de ces fleurs qu’elles lui offrirent, et qu’elles repandirent sur son passage.

Un peu plus loin étoient vingt quatre filles de quinze à vingt ans des Familles les plus distinguées de la Bourgeoisie, habillées d’étoffes superbes, suivant les différentes modes allemandes de Strasbourg, les cheveux tressés et pendants ; leur ajustement étoit encore relevé par leurs graces et par leurs charmes naturels, elles exprimérent de la même maniére les vœux et la joye publique.
Un pareil nombre de personnes choisies du même sexe, habillées à la Françoise, et placées à cent pas de la s’acquittérent des mêmes devoirs.

Le Magistrat avoit fait dresser d’intervalle en intervalle des échaffauts occupés par le reste de la jeunesse de Strasbourg proprement habillée, qui multiplioit les acclamations au passage du Roy.
Une multitude innombrable d’habitans et d’étrangers bordoit les rues derriére les Troupes, remplissoit les fenêtres des maisons jusque sur les toits, et formoient un coup d’œil aussi agréable que varié.

Sa Majesté étant arrivée devant le principal portail de l’Eglise Cathédrale descendit de Carosse, et fut reçue par M. le cardinal de Rohan qui étoit a la tête de tout son clergé, avec M. le Cardinal de Soubise son Coadjuteur, et M. l’Evêque d’Uranople son Suffragant. Son Eminence fit au Roi un tres beau discours, après lequel Sa Majesté fut conduite jusqu’au pied du maître Autel à un Priedieu couvert d’un tapis de soye et de velours, où M. le Prince Camille de Rohan Guémené, fils de M. le Prince de Montauban, et Chanoine domicillaire de cette Cathédrale présenta le Carreau a Sa Majesté. Le Roi après avoit fait sa priére, se rendit à pied au Palais Episcopal, où il avoit choisi son logement.

Les petits Cent-Suisses se trouvérent rangés en haye dans la cour : les Troupes Bourgeoises qui fermoient le cortége, suivirent jusqu'à l’entrée, et passérent en revüe devant Sa Majesté qui se mit aux fenestres pour les voir défiler.
Tous les Corps furent ensuite admis à complimenter Sa Majesté.

En face du Palais sur le bord de la riviére d’Ill, le Magistrat avoit fait construire un Edifice de quarante à cinquante pieds de haut sur près de cent de large, représentant un Arc de Triomphe à sept arcades. Dans celle du centre, plus spacieuse et plus exhaussée que les autres, on voyoit le Roi à cheval arrivant en Alsace, avec cette devise : CUM DOMINO PAX ISTA VENIT. Au sommet de cette arcade étoit un Soleil entouré de ces mots : NEC PLURIBUS IMPAR. Dans la seconde du côté droit, étoit l’Alsace représentée sous la figure d’Andromede attachée à un Rocher, que Persée délivre du monstre qui étoit prêt à la dévorer. L’empressement du Roi à venir secourir cette Province étoit exprimée par ces deux mots : RESPICIT UNUM. Du côté gauche à la sixieme arcade Minerve tenant la lance et l’égide redoutable, avec la devise : PRUDENTIÂ ET VIRTUTE, faisoit le simbole de la Sagesse du Roi dans ses projets, et de sa force dans l’éxécution. Les deux arcades étoient surmontées des Armes du Roi avec les trophées. Les autres étoient ornées de Guirlandes et se terminoient en Fleurs-de-Lis de même que les Piramides posées sur les angles de la balustrade, qui regnoit le long de l’Edifice.

Sur les neuf heures du soir Sa Majesté ayant agrée que l’on mit le feu à l’artifice, à l’instant une caisse de fusées partit. Le Soleil, les Armes du Roi, les emblêmes et les devises, les piramides et les Fleurs-de-Lis s’enflammerent tout-à-coup d’une lumiere vive et brillante dont la couleur se diversifia jusqu’à trois fois pendant la durée de l’artifice. La balustrade fut en même tems bordée de pots à feu divisé par des vases, formant des fontaines jaillissantes. Le long de la balustrade et aux colonnes de l’édifice étoient placées des roües de feu, et des Soleils tournans. De ces mêmes colonnes s’élevoit une multitude infinie de fusées, qui montant à une hauteur extraordinaire, se terminoient dans les rües par des étoilles, qui paroissoient tenir la place de celles que le tems obscur déroboit à la vüe. Des Bombes d’artifice, des gerbes de feu remplissoient l’air de balles luisantes, de serpenteaux, qui après s’étre tenus cachés quelques tems sous l’eau dans laquelle ils tomboient, en ressortoient subitement, couvroient toute la surface de la riviere et se dissipoient en mille éclats.

Du côté droit de l’édifice, au milieu de la riviere étoit un Dieu des Eaux représentant le Rhin, appuyé sur une arcade formée de joncs. Vis-à-vis étoit une divinité représentant la riviere d’Ill placée de même : de ces deux figures, et des roseaux sortoient une infinité de feux, ainsy que de quatre grands Dauphins, qui soutenoient les arcades de joncs. Derriere le Rhin étoit une représentation des Armes de France de plus de vingt pieds de hauteur, entre deux piramides, le tout orné d’artifice de diverses couleurs, et de vases jettant des fusées, des serpenteaux, des plongeons.

A l’arcade de joncs sur laquelle étoit le Rhin, parut tout-à-coup Neptune armé de son trident, dans un char tiré par deux chevaux marins. Des pointes de trident, des rayons de la couronne, ainsi que des yeux, des oreilles, et des narines des chevaux, jaillissoient mille feux differens. Le char dont les roües formoient des Soleils tournans, s’étant avancé jusqu’au milieu du bassin s’arreta sous les fenêtres du Roi, et après quelques instans toute la machine éclata avec fracas, répandant dans l’air une si prodigieuse quantité de fusées, de serpenteaux et d’autres artifices, que les spectateurs furent quelque tems partagés entre la crainte et l’admiration.

Ce feu dont la durée a été d’environ trois quarts d’heure, fut servi avec une promptitude surprenante, au bruit des Timballes, des Trompettes et de toutes sortes d’Instruments de Musique, placé aux extremités du bassin sur deux orquestres peints en forme de bateaux, illuminés , couverts de guirlandes et de banderolles, avec les Armes de France audessus. Le bord du quai représentoit la façade d’un Palais, dont toutes les croisées étoient chargées de plusieurs milliers de Lampions. Le mauvais tems ne permettoit pas d’esperer un succés si favorable ; aussi le Roi en parut-il si content, qu’il eut la bonté d’en temoigner publiquement une satisfaction particuliere.

Toute la Ville fut illuminée. Le zêle des habitans étoit marqué par l’élegance et le goût de ces illuminations, les ornements et les devises dont elles étoient décorées. La flèche de la Tour de la cathédrale, les escaliers des quatres tourelles formés en escargots à jour, les balustrades de la platte forme, celles des galleries et de toute la longueur de la nef de ce grand édifice, étoient éclairées de pots à feu, qui sembloient avoit transformé en cristal ce merveilleux morceau d’Architecture. Ces illuminations furent répetées pendant tout le séjour du Roi.

Les Festins et les repas furent encore une preuve de la joye publique. Le Magistrat fit abandonner au peuple sur la place de l’Hôtel de Ville, un bœuf entier roti, farci et entouré de toutes sortes de viandes et de volailles. On lui distribua du pain, et il prenoit le vin aux fontaines qui couloient sur differentes places. Ainsi se terminerent les rejouissances du cinquieme jour.

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·   LE 6 OCTOBRE
Le sixieme jour, le Roi sortit après son diné entre midi et une heure pour visiter les Remparts et les Fortifications de la Ville : Il trouva dans la cour du Château les petits Cent-Suisses rangés en ordre. Les troupes Bourgeoises étoient postées sur l’Esplanade à gauche du chemin par lequel le Roi devoit passer pour monter aux Ramparts. Sa Majesté les ayant vûs changea le dessein qu’elle avoit eu de monter par la droite, et prit sur la gauche, faisant à ces Troupes la grace de suivre la ligne qu’elles formoient.

Au retour du Roi, le corps des Tonneliers se présenta et offrit à Sa Majesté les vins d’honneur du Magistrat, dans des tonneaux de grandeur considerable , industrieusement construits, liés de cercles de cuivre doré, et de fer argenté, et chargé de beaucoup d’ornemens. Plusieurs autres de differentes figures étoient de même que les précedens, sur des chariots peints et ornés tirés par des chevaux proprement harnachés. Un de ces tonneaux solidement construits en forme ovale sans aucun cercle, contenoit trois sortes de vins, que l’on en tiroit sans confusion. Sur d’autres étoient assis des Bacchus couronnés de pampres avec les autres attributs de cette Divinité et accompagnés de Silenes.

Vingt danseurs du même corps en chemises garnies de dentelles fines, ornés de guirlandes et de couronnes de fleurs, éxécuterent avec beaucoup de justesse, plusieurs danses et plusieurs jeux avec des cerceaux quils tenoient à la main.
Cette Troupe étoit précédé et conduite par plusieurs Officiers, maitres du corps, richement habillés ; le Porte Enseigne fit l’exercice du drapeau avec une adresse peu commune.

Pendant le souper du Roi, on tira de dessus la platte forme du clocher, une grande quantité des plus grosses fusées ; vingt quatre partirent de la pointe de cette Tour, haute de plus de cinq cens pieds. Ces feux qui montoient à une élévation prodigieuse et que l’on s’attachoit à suivre de la vûe, disparoissoient enfin dans les airs.

Le lendemain le Roi sortit à la même heure, et alla visiter la Citadelle et les bords du Rhin les Troupes Bourgeoises toujours dans le même ordre se trouverent par tout sur la route. Ce zele plus tellement au Roi, que pour en marquer sa satisfaction, il confia à cette Milice la garde de son Palais, où elle resta jusqu'à son départ.

Lorsque Sa Majesté fut rentrée, les Batteliers qui avoient paru devant elle le matin dans leurs ajustement, firent sur la riviere leurs jeux consistans à couper à coup de lance, en passant dans une nacelle empotée rapidement par huit rameurs, les cercles d’un tonneau posé sur une espece de pivot ; à décoler à coups de sabre plusieurs figures placées de distance en distance, à courre la bague, à arracher le col d’une oye suspendüe à une corde ; les exercices se terminerent par des joutes, que des Batteliers montés sur le tillac d’une nacelle font en se choquant à la rencontre, avec des lances de quinze à seize pieds de long, dont le bout forme une pomme garnie de cuir.

A la suite de ces jeux et à l’entrée de la nuit la riviere fut couverte de serpenteaux, de fusées, de gerbes de feu, de balles luisantes, de bombes d’artifice, qui tantôt en s’élevant, tantôt en se plongeant dans l’eau, formoient une espece de combat, qui amusa agréablement pendant près d’une heure.

Le huitieme jour, le Roi continua la visite des Fortifications et des dehors de la Ville. A son retour les Pêcheurs firent de même que les Batteliers l’exercice de la bague, de l’oye, et les joutes. Ils y ajouterent celui du canard suspendu dans une arcade de joncs, et deffendu par une espece de Triton ; les Pêcheurs passant au travers de l’arcade, dans de petites nacelles peintes, attaquoient le canard, et lorsqu’ils l’atteignoient, un baquet rempli d’eau posé sur un pivot qui venoit à tourner, se renversoit sur eux et les faisoit lacher prise ; en même tems le Triton qui étoit assis sur l’extrémité du pivot, tomboit dans l’eau. Cet amusement qui plut beaucoup, fut suivi de la pêche au trident, après laquelle on en fit une au filet. On avoit rassemblé dans le bassin une quantité considérable des plus beaux et des plus excellens poissons. La pêche fut abondante : on prit plusieurs Carpes de 29 à 30 livres, beaucoup de Brochets de 35 à 36 livres, et un grand nombre de Saumons, de Saumonneaux, de Truittes et d’autres poissons. Ils furent présentés au Roi qui daigna les accepter avec beaucoup de bonté.


Le neuvieme jour, le Roi se rendit à l’Arsenal, fit couler en sa présence plusieurs pieces d’Artilleries, et se fit donner une explication éxacte de tout ce qui concerne cette partie de l’Art Militaire.
Au retour de Sa Majesté, les Boulangers en corps, habillés avec la même richesse et le même goût que les autres Troupes, conduits par leurs Officiers éxécuterent leurs jeux et leurs danses avec des épées devant le Roi, et lui présenterent un Gateau de Païs, orné de différentes espéces de patisseries et de fleurs.

Pendant le tems que le Roi à honoré la Ville de Strasbourg de sa présence, Sa Majesté en a marqué tous les momens par de nouveaux effets de bonté, de douceur et de liberalité. Aimant son peuple autant qu’elle en est aimée, Elle souffroit d’en être approchée jusqu’à l’importunité. Sa Majesté désira Elle même, que les Bergeres et Bergers, et les jeunes personnes des deux sexes, qui s’étoient trouvées sur son passage, fussent admis à lui présenter leurs respectueux hommages dans son Palais ; elles l’y virent souper, et le Roi prit plaisir pendant deux jours de suite à les y voir exécuter les danses du païs, après quoi Sa Majesté leur laissa la liberté de prendre une collation digne de la magnificence d’un grand Roi, qu’on leur servit par ses ordres, et de continuer leurs danses.

La mémoire de tant de graces sera à jamais en vénération aux habitans de cette Ville, au bonheur desquels Sa Majesté a véritablement daigné s’interesser, en donnant à M. De Klinglin la Survivance de la Charge de Preteur Royal pour M. son Fils. Faveur singuliere que la maniere dont elle a été accordée, rend encore plus précieuse.


Le dixiéme Octobre, jour fixé pour le départ du Roi, toutes les Troupes Bourgeoises, tant Cavalerie qu’Infanterie, M. le Preteur Royal et leurs Officiers à la tête, les Cent-Suisses, les Bergeres et Bergers, et les jeunes filles sortirent de la Ville à neuf heures du matin, et occuperent différens postes jusqu’à l’extremité de la Banlieüe, où elles remplirent les mêmes devoirs qu’à l’entrée, par des acclamations et par des couronnes de Lauriers que les Bergeres et les filles offrirent à Sa Majesté.
Le Roi partit au son de toutes les Cloches de la Ville, et au bruit de toute l’Artillerie des Remparts, laissant tous les cœurs pénétrés de la joye d’avoir vû, et du regret de perdre si-tôt CE MONARQUE BIEN-AIME.

 

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